Marie-Amélie Germain - Angela M. Flaig
dans les nuages

du 9 octobre au 14 novembre 2021

 

 

Vernissage

Samedi 9 octobre de 14 à 19h
et dimanche 10 octobre de 14h à 19h 

 

Permanence

Samedis de 14h à 19h
Dimanches de 14h à 19h 

 

et sur rendez-vous en
téléphonant au 06 85 22 95 42

 

 #GALERIENICOLEBUCK

 

 

 

 

Les nuages

 

“Les nuages”, un thème en soi, un focus dans mon travail autour du paysage. Extraits des compositions, ils deviennent un motif à part entière.

Comme de grandes rêveries, c’est l’intrusion de l’arbitraire dans le réel. Ils participent du réel et cependant s’en extraient. Volume à géométrie variable, l’ombre et la lumière les définissent, leur présence relève du dessin… et cependant je les considère comme la part abstraite de mon travail. Ils correspondent à une tentative d’émancipation, une façon d’échapper au dictat du dessin pour aller plus avant dans la peinture comme on va au large…

Aussi, parfois je construis mes formats autour de doubles : une huile, un fusain ou une huile, une craie rouge... le dessin est le socle sur lequel je me suis construite, envahissant ou en sourdine, il est indissociable de mon travail. Il a su embellir mon rapport au réel et plus j’avance dans ma vie d’artiste et plus je lui suis reconnaissante de me donner autant de mal, d’insatisfaction et de plaisir aussi...car quelle émotion éternellement renouvelée de prendre en main peu importe l’outil, et de voir…

Dans cette série, j’aime la cohabitation des deux. Même si un soucis d’équité m’anime, l’un donnant sa légitimité à l”autre, sa force aussi... j’aime quand le dessin tempère la couleur, et quand la couleur relève l’ascétisme du noir et blanc. Pour la craie rouge, il s’agit d’un soucis rétinien, l’effet coloré est sans pareil dans un tropisme contraire au fusain, son double inversé. Le rouge c’est la permission de changer de braquet, d’utiliser une couleur dynamique et ostentatoire.

L’effort de simplification est semblable, Il s’agit toujours d’ombres et de lumière, d’équilibrer les valeurs moyennes et sombres pour obtenir des harmonies au plus justes comme celles de la nature...et faire fuser la lumière...

 

Marie-Amélie Germain, Sept. 2021

Le conciliabule des graines, des pistils

 

Angela M. Flaig récolte des graines, des fleurs et des pistils (pissenlit, cèdre, épilobe, chardon, etc.). Le premier geste artistique est de les cueillir, d’être imprégné par leur beauté naturelle, par la légèreté des matériaux. Lorsqu’on voit Angela M. Flaig manipuler ces merveilles se dégagent une grande attention, une sensualité, et surtout l’ouverture d’un monde formel infini. Elle cueille comme on accueille un évènement toujours inattendu. Ensuite, elle assemble ces graines et ces pistils selon des dispositifs élaborés.  Elle forme des objets dont on peut dire qu’ils sont d’une immatérialité spirituelle.  Je veux dire par là qu’il s’agit d’une matérialité qui n’est caressée que par les yeux. 

Elle dispose sa récolte de telle manière qu’apparait une transparence, une épaisseur à l’immobilité qui tremble, notamment dans ce qu’on appelle des coupes, des coupoles inversées. Bien des formes qu’on trouve dans la nature viennent à l’esprit. Des nids par exemple mais qui deviennent ici des écrins pour la légèreté, pour la suspension, un lieu pour la rêverie. Une aspiration de l’air inspiré par l’espace. Ce que l’artiste recueille c’est encore la disposition qu’ont les graines de parcourir (grâce aux vents) d’incroyables distances, et de pousser en des lieux nouveaux et parfois venant des temps anciens. L’artiste dit « grandir et changer, devenir et disparaître sont les intentions de mes objets et les traces de mes dessins ». Elle parle bien de l’intention des objets et des traces qu’elle produit comme si le corps et l’esprit de l’artiste entrait en résonnance avec les graines, fleurs et pistils recueillis. Et véritablement, par la seule observation, nous sentons ces vibrations qui viennent tant de l’objet cueilli que de l’assemblage proposé. Parfois, un trait plus sombre, dans la légèreté blanche presque laiteuse, scande la profondeur d’une transparence intemporelle.  

Une chose aussi est fondamentale. La disposition de chaque élément se fait selon un protocole à dimension conceptuelle. Agencement qui forme un carré, répétition stricte qui grâce aux infimes différences des particules choisies devient vibrante. Certains de ses exégètes (comme Antje Lechleiter) parlent « d’une qualité presque cinétique inhérente au travail réalisé à partir de graines de cèdres ». En l’esprit de ce travail résonne des références à l’arte povera, à l’art minimal, concret et sériel. On ne peut s’empêcher de penser à l’exposition mythique quand les attitudes deviennent formes initiée par Harald Szeemann (Berne 1969) dont cette œuvre poursuit la modernité. La répétition aussi implique de saisir les différences infimes qui existent entre les éléments (qui paraissent identiques). Ces différences, pour qui accepte de regarder longuement, font comme des déflagrations, ouvrent des territoires (de l’art et de la nature) insoupçonnés. Si l’expression toucher des yeux existe elle prend ici tout son sens. Nous captons la fragilité et dans le même temps se fait jour une éternité instantanée. Nous saisissons la légèreté et la tactilité du suspens. 

La galerie Nicole Buck propose une première approche de cette œuvre riche par son histoire, féconde par son ancrage aux grandes questions posées par l’art, et qui interroge sur l’intervention humaine dans la nature (celle qui fait disparaître de nombreuses espèces florales et animales).  C’est une œuvre qui témoigne de la diversité à protéger, de la beauté à reconquérir, de l’humilité à redéployer dans le regard et dans les attitudes.  

 

Germain Roesz, sept. 2021

 

 

 

 

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